TOUBABOU'S REMAINS

Vidéo et costume, 2007
Hs. Characters / 13 mn 10

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Une situation incongrue : une saillie.
Sous couvert de peaux. Sous couvert d’Afrique.
Où l’on peut voir un personnage qui piétine ; s’acclimate négligemment à la terre où il est posé, déambulant d’une parcelle inconnue à l’autre, s’en faisant une vague intrigue ou une bête conquête. Un « blanc » vêtu pour l’occasion d’un voyage sans fondement, qui s’acharne à de multiples déplacements, dodelinant dans l’espace présumé vierge et absorbable. Ainsi paré, le simple fait de bouger devient une ineptie. Un benêt ou autre brusque qui constate sans battre des cils pour tenter la distance ; qui dissimule tant bien que mal cet inconnu qui le terrasse. Qui repère, cherche malgré lui, prend possession du regard. Pas comme on sent, comme on calcule. Qui échafaude, mesure, envisage et déjà détruit par son seul regard, trépigne comme s’il achetait, dévisage comme s’il gouvernait.
Une allure détachée d’homme de circonstance qui écrase, pourtant, sous le soleil terrible. Détaché, excepté peut-être cette raideur soudaine qui saisit le corps. S’ensuit la chaleur dans la seconde peau d’appoint qui ne cède ni à sa nécessité, à sa mouvance. Comme pour se défaire, abondant dans le sens de la température, l‘homme, petit à petit, s’humecte comme on avoue, par petites touches jusqu’à l’entièreté, jusqu’au ridicule. Un grossier aux allures de cow-boy, en mal d’exotisme indéfini qui, tantôt croit leurrer, tantôt persuade par sécheresse, avenant ; tantôt s’abandonne à son ignorance. Un interprète du gouffre entre deux manières de pratiquer le monde, qui meuble ; perd la vitesse, la tête et ses repères qu’il croyait garantis. Tant que je tiens debout, le monde reste intelligible, tant que j’inonde, le monde s’attendrit peut-être. Comme sa maigre tenue qu’il mouille encore, s’emploie à tremper minutieusement, jusqu’à s’agacer à la baigner, une contorsion après l’autre pour qu’elle reste vivable et ne réussisse pas, complice de son souffle, à l’asphyxier. Pourrait-on ici s’imbiber jusqu’à l’ivresse ?
D’un coup, s’excite, révèle l’ampleur de son ignorance et réintègre la transe qui, ici, lui semble bienvenue : ce qui en guise d’appartenance fait ici, figure de danse décharnée et saugrenue entre hystérie et farce comique. Puis court encore, vite, s’échappe. Echappe au réponses abruties, file à travers les écheveaux de son éducation. Sans doute, essaie t’il de devancer ses frissons systématiques. C’est une bien hasardeuse lutte entre canicule et bouts de peaux humectées, sans relâche. Pour rester là où c’est convenu, protagoniste digne et déterminé, qui pose sans suffoquer, évolue sans autres débordements que ceux qu’il a pu imaginer.
Le monde des objets-rempart est loin, au-delà de la mer. Enfin, il n’a jamais su comment lui convenir, entre farce et appartenance. Le plus aisé siége certainement dans l’oubli de cet autrement. Normal pour un corps qui se croyait à l’épicentre, comme indiqué sur les atlas et dont les songes n’avaient jamais traversé de frontières. Normal pour un corps tellement tendre qui vit chaque jour, sous des strates de couches. Là, où il en est, le vent le râpe déjà.

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Personnage > Nicolas Brygo
Costume > débardeur, short, casquette, tongs et lunettes en peau de chèvre tannée, cousus à la main et réalisés sur place.
Lieux de tournage > Piste d’atterrissage abandonnée, Nouna - Burkina Faso / Rives du Fleuve Sénégal, Bamako / Brousse aux alentours de Bamako > Mali.
Bande sonore > Nappe de base composée par Attilio Sattolo (guitare électrique) / samples > Edouard Sattolo (guimbarde) Jessika Laranjo (conversations, chants maliens, bruitages, etc.) + un extrait de banjo de 2 secondes du film "Délivrance" de John Boorman (1972) qui démonte, tambour battant, le mythe du retour à la nature, et dont personne ne sort indemne.

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Extrait :
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 Toubabou's remains    Vidéo ©Jessika Laranjo 
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